JULIEN CHAMPAGNE
Artiste visuel et compositeur

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A TAKE ON PIECE FOR GUITARS 


A Take on "Piece for Guitars" tire son origine de l'installation Pieces for Instruments, qui regroupe trois performances sonores filmées intitulées Piece for Drums, Piece for Microphones et Piece for Guitars. Dans chacune de ces performances, un instrument de musique est traîné au sol lors d’une longue et lente déambulation dans un site naturel. Cette démarche vise à faire « chanter le paysage » en utilisant le sol comme une partition musicale. Elle cherche, par le fait même, à questionner la manière dont le paysage façonne notre culture et, plus spécialement, nos imaginaires sonores et musicaux. 

La performance Piece for Guitars s’est déroulée pendant le mois de septembre 2018 à la Pinède provinciale de Lachute, au Québec. Les sons de guitare enregistrés ce jour-là représentent l’unique matériau utilisé pour la composition de l’album A Take on "Piece for Guitars". De fait, ce projet peut à la fois être entendu comme une réminiscence de la performance ou comme une oeuvre musicale indépendante. 




PIECES FOR INSTRUMENTS


Pieces for instruments est une installation vidéo qui rassemble trois déambulations filmées visant à faire dialoguer sons et paysages. Dans chacune des projections vidéos, une figure humaine parcourt à pied un site naturel en tirant derrière elle, à l’aide d’une corde, un instrument de musique qui traîne au sol. Les sons produits peuvent être entendus individuellement dans des casques d’écoute, ou tous ensemble dans l’espace de la galerie, formant ainsi une sorte de musique rock aléatoire.

Comment le paysage influence-t-il l’imaginaire sonore et musical des gens qui l’occupent ? Quels instruments, quels rythmes et quelles mélodies un paysage donné est-il susceptible d’évoquer? Par quels moyens le sol d’une montagne, d’une forêt ou d’une plage peut-il faire office de partition musicale? Ces questions se croisent dans l’espace sombre de la galerie, qui invite à l’écoute et à la contemplation. 



DATA STRING OSCILLATIONS


Data String Oscillations a été créé à partir de cinq cassettes audio figurant dans la collection du centre de documentation Artexte. Des segments tirés des cinq cassettes ont été échantillonnés, puis mêlés à des sons enregistrés dans l'environnement physique d'Artexte (grincements métalliques des rayonnages, grésillements électromagnétiques émis par le thermohydrographe, sons produits par des ordinateurs naviguant dans la base de données du catalogue, etc.).

Les métadonnées rattachées aux fichiers audio numériques des cinq cassettes ont servi à former des « partitions », à l’aide d’un logiciel qui transforme les caractères alphanumériques en paramètres du langage musical MIDI. Au total, quatre familles de métadonnées ont guidé la composition, dont les noms sont également attribués aux quatre pistes de l’album.

L’album vise à souligner l'originalité des œuvres sélectionnées, tout en donnant une voix au cadre archivistique qui permet leur gestion et leur préservation.




CYCLES AND CYCLES


Cycles and cycles est un dispositif d’écoute qui diffuse une composition sonore dont la structure se modifie constamment. Sur un socle pentu, quatre lecteurs portatifs font jouer des cassettes audio de durées différentes. Les bandes magnétiques des cassettes sont « mises en boucle » de manière à ne jamais s’arrêter et les moteurs des lecteurs ne tournent pas exactement à la même vitesse. Ainsi, par désynchronisation, la structure de la pièce est modifiée à chaque itération des boucles. Tels les instruments d'un quatuor, chacune des cassettes contient une piste sonore qui, une fois jumelée aux autres, forme l’univers musical de la pièce.

Tous les sons entendus proviennent d’un enregistrement effectué dans une morgue. Ils ont été librement modifiés de manière à en extraire des qualités musicales. La structure répétitive de la pièce peut évoquer les cycles de la vie et de la mort, ainsi que ceux du travail et du deuil qui s’entrecroisent quotidiennement dans l’environnement de la morgue.




ÉCRANS


Écrans vise à illustrer les liens qui unissent le cinéma à l’imaginaire de la mort. Nombre de théoriciens ont étudié le cinéma sous l’angle de la « spectralité », l’élisant parfois comme l’art fantomatique par excellence, à cause, notamment, de sa temporalité particulière qui intrique le présent et le passé ; comme si le temps du tournage revenait « hanter » le temps du visionnement. Cette installation suggère de donner forme à cette analyse, en l’incarnant à travers un dispositif lumineux et vidéographique.

Pour ce faire, des prises de sons ambiants ont été effectuées sur les pierres tombales de cinq cinéastes québécois. Ces captations sonores ont ensuite servi à faire scintiller un cadre lumineux audio-réactif qui, grâce à un dispositif de transformation du son en lumière, palpitait au rythme des variations de volume des pistes sonores. Ce cadre a été installé dans cinq sites du territoire du Québec ayant jadis servi de lieux de tournage dans les films des cinéastes sélectionnés. Ces interventions dans le paysage ont à chaque fois été filmées, à la tombée du jour.

Les plans qui en résultent durent 40 minutes, ce qui permet d’abord de voir le dispositif planté dans le paysage, puis, au fur et à mesure que l’image s’obscurcit, de le voir disparaître au profit d’un simple rectangle de lumière qui semble flotter dans l’environnement. Ce rectangle de lumière peut, par sa forme, évoquer la figure archétypale de l’écran de cinéma, ou encore rappeler les collimateurs autofocus visibles dans les viseurs de nombreuses caméras photo ou vidéo. La lumière scintillante évoque quant à elle l’un des principes fondamentaux du cinéma : la palpitation lumineuse qui permet de créer l’illusion du mouvement.




PRINTED ERASED DE KOONING DRAWING


Ce projet prend comme point de départ l’œuvre de Robert Rauschenberg intitulée Erased de Kooning Drawing, pour laquelle l’artiste effaça entièrement, en 1953, l’un des dessins du célèbre peintre Willem de Kooning.

Ce geste iconoclaste notoire est certes provocateur. Or, dans l’art comme dans la vie, la provocation appelle souvent la riposte. Voilà sans doute la forme que prend ce projet : une riposte qui tente de renvoyer à l’œuvre de Rauschenberg l’étendue de son audace, en la détournant comme elle détourna jadis l’esquisse de De Kooning.

Ici, une reproduction de l’œuvre de Rauschenberg a été imprimée, puis encadrée en respectant ses dimensions originales. Lors de l’impression, des sons électromagnétiques émis par l’imprimante ont été enregistrés pour ensuite être assemblés et diffusés par six haut-parleurs jouxtant la reproduction. Ainsi, si la proposition de Rauschenberg mettait autrefois en relief des procédés d’effacement et de disparition, elle est ici « contrefaite » pour faire valoir des procédés d’écriture et d’apparition. Sorte d’interprétation audible de l’œuvre de Rauschenberg, cette nouvelle version en déplace le point de mire, le faisant aller et venir entre absence visuelle et présence sonore.